
En doit de la famille comme en tous les domaines, les situations « internationales » sont de plus en plus fréquentes. Il n'est pas rare que deux époux français résident à l'étranger, ou qu'un Français ait un conjoint d'une autre nationalité.
En cas de divorce, trois questions peuvent se poser :
- quel tribunal saisir de la demande en divorce ?
- quelle loi ce tribunal appliquera-t-il ?
- un divorce prononcé à l'étranger produit-il ses effets en France ?
C’est le droit international privé de chaque pays qui s'appliquera pour résoudre ces conflits de juridictions et de lois. Voici l'état du droit international privé français.
Divorce international : quel est le tribunal compétent ?
Il convient en premier lieu de résoudre le conflit de juridictions.
Le droit international privé français
L'article 14 du Code civil dispose que : « L'étranger, même non résidant en France, pourra être cité devant les tribunaux français, pour l'exécution des obligations par lui contractées en France avec un Français ; il pourra être traduit devant les tribunaux de France, pour les obligations par lui contractées en pays étranger envers des Français ».
Ainsi les tribunaux français peuvent être compétents si le demandeur est français même s'il ne réside pas en France, et même si son conjoint n'a pas la nationalité française.
Mais deux époux de nationalité étrangère résidant en France peuvent également saisir le juge français de leur demande en divorce, en se fondant sur le critère de leur résidence habituelle en France.
La demande est formée au greffe du tribunal judiciaire (ex-tribunal de grande instance) du lieu de résidence de la famille, à défaut de l'époux ayant la charge des enfants, à défaut de l'époux qui n'a pas pris l'initiative du divorce (article 1070 du Code de procédure civile). Si le demandeur ne réside pas en France, il s'adresse au greffe du tribunal judiciaire de Paris
Le droit communautaire
Le règlement Bruxelles II bis n° 2201/2003 du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et de responsabilité parentale est applicable depuis le 1er mars 2005 à tous les États membres de l'Union européenne.
En matière de conflits de juridictions, l’article 3 du Règlement Bruxelles II bis prévoit ainsi que :
« Sont compétentes pour statuer sur les questions relatives au divorce, à la séparation de corps et à l’annulation du mariage des époux, les juridictions de l’État membre :
Sur le territoire duquel se trouve :
- la résidence habituelle des époux, ou
- la dernière résidence habituelle des époux dans la mesure où l’un d’eux y réside encore, ou
- la résidence habituelle du défendeur, ou
- en cas de demande conjointe, la résidence habituelle de l’un ou l’autre époux, ou
- la résidence habituelle du demandeur s’il y a résidé depuis au moins une année immédiatement avant l’introduction de la demande, ou
- la résidence habituelle du demandeur s’il y a résidé depuis au moins six mois immédiatement avant l’introduction de la demande et s’il est soit ressortissant de l’État membre en question, soit, dans le cas du Royaume-Uni et de l’Irlande, s’il y a son domicile ;
- de la nationalité des deux époux ou, dans le cas du Royaume-Uni et de l’Irlande, du domicile commun. »
Bon à savoir : les cas de litispendance (dans lesquels plusieurs tribunaux sont compétents) sont nombreux. Il est donc recommandé de ne pas traîner pour saisir son tribunal, car le deuxième tribunal saisi doit surseoir à statuer jusqu'à ce que le premier se prononce sur sa compétence.
Quel est le droit applicable en cas de divorce international ?
Le tribunal saisi d’une demande en divorce doit d'abord statuer sur la loi applicable au divorce. Il ne va pas forcément appliquer son droit national : il peut être amené à appliquer un droit étranger.
Le droit international privé français
Le juge français saisi d’une demande de divorce « international » applique l'article 309 du Code civil qui dispose que « le divorce et la séparation de corps sont régis par la loi française :
- lorsque l’un et l’autre des époux sont de nationalité française ;
- lorsque les époux ont, l’un et l’autre, leur domicile sur le territoire français,
- lorsque aucune loi étrangère ne se reconnaît compétence alors que les tribunaux sont compétents pour connaître de la procédure de divorce ou de séparation de corps. »
La loi française s’applique donc aux Français, mais également aux étrangers résidant en France.
Le droit communautaire et les convention internationales
Le règlement communautaire Rome III de 2010 est entré en vigueur en France le 21 juin 2012.
Depuis cette date, dans les États signataires (Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Espagne, France, Italie, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Hongrie, Malte, Portugal, Roumanie, Slovénie), les époux peuvent choisir la loi applicable à leur divorce dans le cadre d'une convention. À défaut de choix, l'article 8 du règlement prévoit d'autres critères de rattachement : la résidence habituelle des époux, leur nationalité commune...
La France a ratifié de nombreux accords et conventions internationaux réglant des conflits de loi particuliers.
Exemples : le règlement CE n°4/2009 du 18 décembre 2008 relatif aux obligations alimentaires ; le protocole de La Haye du 23 novembre 2007 sur les obligations alimentaires (la loi applicable étant en principe la loi de la résidence habituelle du créancier) ; la Convention de La Haye du 19 octobre 1996 concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l'exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants selon laquelle le juge compétent devra appliquer sa propre loi nationale.
La France a également ratifié des conventions bilatérales.
Exemple : la convention franco-marocaine de 1981 soumet la dissolution du mariage à la loi nationale commune, et à défaut à la loi de l’État sur le territoire duquel les époux ont leur domicile commun ou avaient leur dernier domicile commun.
Divorce avec un étranger Lire l'article
Divorce international : divorces prononcés à l'étranger
Au sein de l'Union européenne
En principe, un divorce prononcé à l'étranger est reconnu de plein droit en France sans formalité administrative ou judiciaire particulière. C'est ce que précise l'article 21 du règlement Bruxelles II bis.
Pour obtenir l'exécution d’une décision rendue dans un autre État membre (par exemple, pour obtenir le versement d'une pension alimentaire non payée), il faut déposer une requête auprès du greffier en chef du tribunal judiciaire.
Avec des États tiers
Un divorce prononcé par un État situé dehors de l'Union européenne est reconnu de plein droit en France sans formalité administrative ou judiciaire particulière.
Cependant, l'époux qui veut obtenir l’exécution forcée de la décision (en matière alimentaire, par exemple) doit former une demande d'exequatur devant le tribunal judiciaire. Le juge va alors vérifier que trois condition sont remplies :
- la compétence du juge étranger ;
- la conformité à l'ordre public ;
- l'absence de fraude à la loi.
Bon à savoir : une décision étrangère contrevenant à l’ordre public ne sera pas reconnue en France. C'est notamment le cas du jugement de répudiation.