Divorce pour faute

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Un homme donne la main à sa maitresse tout en marchant avec sa femme

Les procédures de divorce sont fonction de la situation dans laquelle se trouvent les époux. Elles peuvent être :

Dans l'esprit de la réforme du divorce du 26 mai 2004, le divorce pour faute ne devrait être retenu dorénavant qu'en cas de violations graves des devoirs du mariage, et notamment les violences conjugales.

 

 

Divorce pour faute : le divorce contentieux

Cette procédure est utilisée par le conjoint soucieux d'obtenir le divorce sur le fondement de la faute commise par son conjoint. Il peut être demandé par un époux sous les conditions suivantes :

  • les faits sont imputables à l'autre conjoint ;
  • les faits constituent une violation grave ou renouvelée des droits et obligations du mariage ;
  • les faits rendent intolérable le maintien de la vie commune.

Cependant, certains époux, compte tenu de l'opposition de leur conjoint à toute procédure de divorce consensuel, et bien que désireux d'éviter un divorce contentieux, n'ont pas d'autre choix que l'introduction d'un divorce pour faute, quitte ensuite à trouver des accords ultérieurs et à changer de procédure de divorce par le système d'une passerelle.

Divorce pour faute : des fautes volontaires et graves

Dans le cadre du divorce pour faute, il est nécessaire de prouver une faute du conjoint. Un simple constat d'incompatibilité de caractère et de mode de vie ne suffit pas à entraîner le prononcé du divorce.

Exemples : des époux étaient séparés depuis de nombreuses années d'un commun accord, vivaient de manière totalement indépendante, sans entretenir le moindre rapport affectif et sans avoir jamais évoqué la moindre envie de reprendre la vie commune. Pour les juges qui ont refusé d'accueillir la demande des époux en divorce pour faute, il n'existait pas de violation des obligations du mariage. Le divorce pour faute ne pouvait donc pas aboutir dans ce contexte, les époux disposant d'autres procédures de divorce correspondant à leur cas, comme le divorce par consentement mutuel. Dans un autre cas, une mésentente avérée et une situation de vie très dégradée, acceptée par les époux qui s'y sont résignés, ne suffisent pas à entraîner le prononcé d'un divorce pour faute ni même aux torts partagés.

La faute ou les fautes doivent :

  • avoir été commises volontairement par l'époux. Celui qui veut divorcer doit prouver que les actes commis par son conjoint revêtent un caractère « intentionnel » : celui-ci doit avoir commis l'acte qui lui est reproché (abandon, violences) volontairement et avec lucidité ;
  • constituer une violation grave ou renouvelées des obligations du mariage. Les devoirs du mariage sont la fidélité, le secours, l'assistance, le respect, la contribution aux charges du mariage et la cohabitation : ils continuent à s'appliquer pendant l'instance en divorce ; et
  • rendre intolérable le maintien de la vie commune.

Les fautes invoquées comme cause de divorce doivent avoir été commises pendant le mariage :

  • elles peuvent même être retenues alors que les époux sont en procédure de divorce et qu'ils sont autorisés à résider séparément par une ordonnance de non-conciliation du juge aux affaires familiales ;
  • il en est ainsi de l'adultère commis par un époux au cours l'instance en divorce ;
  • ceci s'explique par le fait que, tant qu'ils ne sont pas divorcés, les époux doivent respecter les obligations du mariage, dont l'obligation de fidélité.

Cependant, les fautes suffisamment graves commises antérieurement au mariage par un époux et dissimulées à l'autre peuvent être retenues comme cause de divorce s'il est jugé que celui-ci ne se serait pas marié s'il en avait eu connaissance : c'est le cas notamment de condamnations pénales cachées par l'un des époux.

Seul le juge aux affaires familiales a le pouvoir d'apprécier si la faute commise peut constituer une cause de divorce au regard des exigences définies par le Code civil.

Si tel n'est pas le cas, l'époux demandeur sera débouté de sa demande en divorce pour faute.

Divorce pour faute : exigence d'une faute volontaire

La faute doit être suffisamment grave

Les tribunaux ont jugé que des actes de violence commis sur un conjoint par un époux en état de démence ne constituent pas une faute cause de divorce, de même que l'adultère commis en état d'aliénation mentale.

Les fautes suivantes ont notamment été retenues par les tribunaux comme cause de divorce :

  • adultère répété ;
  • utilisation répétée du minitel rose ou de sites de rencontre ;
  • abandon du domicile conjugal ;
  • harcèlement moral, physique, téléphonique, violences physiques, injures verbales ou écrites, menaces de mort contre son conjoint ;
  • scènes de ménage publiques ;
  • mauvais traitements envers les enfants du couple ;
  • condamnations pénales graves ;
  • dilapidation de l'argent du ménage ;
  • refus de contribuer à l'entretien de la famille ;
  • pratique excessive de la religion, d'un sport ou d'une activité préjudiciable à la famille :
    • relations sexuelles abusives ou pratiques sexuelles anormales ;
    • refus de relations sexuelles ;
    • consommation excessive d'alcool mettant en péril l'équilibre familial ;
    • grossesse dissimulée.

Le cas particulier de l'adultère

L'un des devoirs du mariage étant la fidélité, l'adultère constitue donc une des causes du divorce. Les juges apprécient si ce grief doit entraîner le divorce, et si ce dernier doit être prononcé aux torts exclusifs de l'époux fautif. Il faut savoir en effet que l'adultère n'est pas une cause automatique de divorce : le moment où est commis l'adultère et le contexte de l'affaire vont jouer. Ainsi, il a été jugé :

  • qu'un adultère unique et commis après le prononcé de l'ordonnance de non-conciliation ne rendait pas intolérable la vie commune ;
  • en revanche, que le concubinage du mari, après l'autorisation de résidence séparée et la naissance d'un enfant de cette nouvelle union, constituait « une violation grave et renouvelée » des obligations du mariage rendant intolérable la vie commune.

L'adultère peut se prouver par des écrits ou autres documents, par témoignages ou par constat. Les documents écrits peuvent consister notamment en des lettres, écrites ou reçues par l'époux fautif, des photographies (prises nécessairement en dehors d'un lieu privé et à l'insu des intéressés), des factures (hôtel, cadeaux, voyages...). Les témoignages peuvent être produits sous forme d'attestations écrites, rédigées par des membres de la famille ou des tiers, qui ont pu constater l'adultère ou recevoir des confidences de l'époux fautif.

Le conjoint peut également avoir recours aux services d'un détective privé, mais la dépense peut s'avérer importante.

L'adultère peut enfin être prouvé, ce qui est le plus fréquent, par constat d'huissier. Pour établir l'adultère par constat, l'avocat du demandeur présente une requête au président du tribunal judiciaire (ex-tribunal de grande instance) compétent, qui désigne un huissier chargé d'établir le constat avec l'assistance d'un commissaire de police. En effet, une autorisation judiciaire s'impose dès lors que le constat doit être établi chez un tiers (il ne faut ni violation de domicile ni atteinte illicite à l'intimité de la vie privée). Cela signifie a contrario qu'aucune autorisation judiciaire n'est requise quand l'adultère a lieu au domicile des époux, puisque dans cette hypothèse il n'y a pas de violation de domicile.

Le coût de l'ensemble de l'opération est élevé, en raison des interventions qu'elle implique :

  • l'avocat doit rédiger une requête et la présenter au président du tribunal ; 
  • il faut prévoir la rémunération de l'huissier de justice, la vacation du commissaire de police et du serrurier.

Il est alors prudent de se renseigner auprès de son avocat, au préalable, sur le montant des frais et honoraires supplémentaires à prévoir.

Le cas particulier de l'abandon du domicile conjugal et du refus de cohabitation :

En vertu de l'article 215 du Code civil, les époux s'obligent mutuellement à une communauté de vie. La résidence de la famille est choisie d'un commun accord. Est donc fautif et susceptible d'entraîner un divorce pour faute l'abandon par l'un des époux du domicile conjugal (lequel abandon du domicile se double souvent d'un abandon financier).

Pour être fautif, l'abandon du domicile conjugal doit réunir les deux conditions posées par l'article 242 du Code civil :

  • une violation grave ou renouvelée des droits et devoirs du mariage ;
  • rendant intolérable le maintien de la vie commune.

Exemples : le refus d'un conjoint de suivre l'autre dans un nouveau logement peut ne pas être considéré par le juge comme fautif, quand ce refus est dicté par la peur de perdre un emploi, de mauvais traitements, de violences conjugales... Ne constitue pas non plus une faute le refus de cohabitation quand le logement choisi par l'un des époux n'est pas suffisamment grand pour accueillir les parents et les enfants.

Le cas particulier de la non-contribution aux charges du mariage

Le refus d'un époux de contribuer financièrement aux charges du mariage peut constituer une faute entraînant le divorce à ses torts, selon l'article 214 du Code civil. En pratique, cette non-contribution est souvent le fait de l'époux qui a déjà quitté le domicile conjugal.

Par charges du mariage, il faut entendre les dépenses de la vie courante telles que les frais de nourriture, de chauffage, de loyers ou de prêt immobilier, les dépenses de scolarité pour les enfants.

En revanche, n'ont pas été considérés comme cause de divorce par les tribunaux :

  • l'impossibilité ou le refus d'avoir un enfant, d'une procréation médicalement assistée ;
  • l'appartenance à une secte dès lors que celle-ci ne nuit pas à la famille ;
  • les fautes commises antérieurement à la réconciliation ;
  • une simple incompatibilité d'humeur ;
  • l'adultère réciproque de deux époux.

Divorce pour faute : fautes des deux époux

Le juge aux affaires familiales doit tenir compte de l'ensemble des relations tissées au sein du couple pour rendre sa décision. La réciprocité des torts, reconnue par le juge, peut aboutir :

  • au rejet de la demande en divorce ;
  • au prononcé d'un divorce aux torts partagés ;
  • au prononcé d'un divorce aux torts exclusifs de l'un des époux.

Il existe des cas où les époux ont tous les deux commis des fautes :

Faute de l'époux défendeur excusée par celle du conjoint demandeur

C'est l'hypothèse où l'époux défendeur assigné pour faute, afin de s'opposer à la demande de divorce, réplique en établissant que son conjoint demandeur a lui-même commis une faute permettant d'excuser la sienne.

Le magistrat examinera les fautes invoquées par chaque époux pour déterminer si l'une excuse l'autre.

Si c'est le cas, il rejettera la demande en divorce.

Cependant, le juge peut tout de même prononcer le divorce aux torts partagés en présence même d'un conjoint défendeur s'opposant au divorce.

C'est l'hypothèse où le juge estime que les fautes commises par l'époux demandeur et présentées par l'époux défendeur pour excuser les siennes justifient de prononcer un divorce aux torts partagés.

Divorce pour faute : les fautes des deux époux

C'est l'hypothèse où l'époux assigné en divorce pour faute réplique en formant lui-même une demande en divorce pour faute à l'encontre de son conjoint pour obtenir le divorce aux torts de celui-ci.

Le magistrat examinera les fautes invoquées par chaque époux pour prononcer :

  • soit un divorce pour faute aux torts exclusifs de l'un ou de l'autre ;
  • soit un divorce aux torts partagés s'il estime que les fautes sont établies de part et d'autre.

Divorce pour faute : établir la preuve des fautes

Les fautes reprochées par un époux à son conjoint doivent être établies pour être retenues comme cause de divorce ou comme défense à une demande en divorce.

Pour ce faire, les époux doivent constituer un faisceau de preuves en remettant à leur avocat le plus de documents possible permettant d'établir les faits reprochés au conjoint :

  • l'avocat communiquera à son confrère adverse les documents qu'il estime probants. Ainsi, chaque époux pourra prendre connaissance des éléments apportés par son conjoint au soutien de ses prétentions ;
  • seules les pièces qui auront fait l'objet d'une communication régulière entre les parties pourront être examinées par le juge, qui en appréciera souverainement la force probante pour rendre sa décision ;
  • à défaut, les pièces sont rejetées des débats ;
  • les pièces peuvent également être rejetées à la demande des parties si elles ne sont pas admises comme mode de preuve.

En matière de divorce, tous les modes de preuve sont admis, même l'aveu.

Cependant, pour constituer des éléments de preuve, les modes de preuve suivants ne doivent pas avoir été obtenus ni par fraude ni par violence :

  • les constats d'huissier ;
  • les témoignages écrits sous forme d'attestations rédigées selon les formes prescrites ;
  • les jugements correctionnels ;
  • les procès-verbaux d'auditions pénales ;
  • les rapports d'expertise médicale ;
  • les rapports de détectives privés ;
  • les documents bancaires ou fiscaux ;
  • les SMS, les courriels, les fax... ;
  • le protocole d'accord entre employeur et salarié...

En revanche, ne sont pas admis :

  • les témoignages des descendants des époux, et notamment ceux de leurs enfants, qu'il s'agisse de leur audition, de leur témoignage écrit, d'un courrier évoquant la situation familiale ou conjugale ;
  • l'attestation des grands-parents relatant les propos de leurs petits-enfants sur le divorce de leurs parents ;
  • l'enregistrement des communications téléphoniques obtenues à l'insu du correspondant ;
  • l'intrusion dans un ordinateur personnel du conjoint ou l'exploitation d'un journal intime obtenu par fraude ou par violence.

Les propos des époux exprimés au cours de l'audience de conciliation ou d'une médiation ne peuvent être retenus comme preuves pour la procédure de divorce, de même que les dires consignés dans le rapport de l'expertise médico-psychologique ordonnée par le juge aux affaires familiales.

Divorce pour faute : les conséquences

Le fait que le divorce soit prononcé aux torts exclusifs entraîne des conséquences pour les époux, concernant la prestation compensatoire, et l'attribution de dommages et intérêts.

La suppression de la prestation compensatoire

Le juge peut refuser d'accorder la prestation compensatoire demandée par un époux, bien que la rupture du mariage ait créé un déséquilibre dans les conditions de vie, si l'équité le commande, lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l'époux qui réclame le bénéfice de cette prestation compensatoire. Les juges apprécient au cas par cas, au regard des circonstances particulières de la rupture.

Bon à savoir : la demande de prestation compensatoire, accessoire à la demande en divorce, peut être présentée pour la première fois en appel tant que la décision, en ce qu’elle prononce le divorce, n’a pas acquis force de chose jugée (Cass, 1re civ., 14 mars 2018, n° 17-14.874).

Les dommages et intérêts

Il est possible, à l'occasion de la procédure de divorce pour faute, d'obtenir des dommages et intérêts pour l'époux victime des conséquences graves qu'il subit du fait de la dissolution de mariage.

Le préjudice, dont l'époux demande l'indemnisation, ne doit être ni antérieur ni postérieur au divorce, mais lié à la rupture du lien matrimonial.

Le conjoint, pour obtenir réparation, doit apporter la preuve d'une faute, d'un préjudice spécifique lié à la rupture, et d'un lien de causalité entre les deux. Le préjudice peut être matériel ou moral.

L'indemnisation est accordée sous forme de dommages et intérêts c'est-à-dire, selon les tribunaux, d'un versement d'une somme d'argent (capital ou rente).

Bon à savoir : les intérêts produits par la prestation compensatoire sont dus à compter de la date à laquelle la décision prononçant le divorce devient irrévocable, et la condamnation à des dommages et intérêts emporte intérêts à compter du prononcé du jugement ou de l'arrêt qui l’a allouée (Cass. 1re civ., 7 février 2018, n° 17-14.184).

Divorce pour faute : la réconciliation des époux

Pour s'opposer à la demande de divorce pour faute de son conjoint, un époux peut établir qu'une réconciliation soit intervenue entre eux postérieurement à l'introduction de la procédure.

Le juge doit apprécier si c'est par une volonté conjointe que les époux se sont réconciliés et ont repris la vie commune.

En effet, le maintien ou la reprise temporaire de la vie commune ne sont pas considérés comme une réconciliation s'ils ne résultent que de la nécessité ou d'un effort de conciliation ou des besoins de l'éducation des enfants.

Si le juge aux affaires familiales estime qu'il y a bien eu réconciliation, il rejettera la demande en divorce la déclarant irrecevable dans la mesure où la faute invoquée ne pourra plus constituer la cause du divorce.

Cependant, il convient de noter que toute autre faute survenue ou découverte depuis la réconciliation pourra faire l'objet d'une nouvelle procédure en divorce. Les faits anciens pourront être rappelés à l'appui de cette nouvelle demande.

Divorce pour faute : la loi favorise les accords entre époux

La législation sur le divorce privilégie les accords entre les époux qui peuvent demander au juge de les entériner à tout moment de la procédure, même si elle est contentieuse.

Ils peuvent demander au juge de se limiter à constater dans les motifs du jugement qu'il existe des faits constituant une cause de divorce sans avoir à énoncer les torts et les griefs des parties.

C'est un moyen fortement recommandé pour éviter aux enfants de découvrir ultérieurement, à la lecture du jugement, le détail du contentieux de leurs parents ayant conduit à leur divorce.

Les accords élaborés par les époux peuvent être partiels ou globaux, et si c'est le cas les époux pourront alors changer de procédure.

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