L'une de vos amies reçoit des coups de la part de son conjoint mais n'ose pas en parler ? Peut-être, vous-même, êtes-vous victime de violences physiques ? Des solutions existent, qui permettent de protéger les femmes et de mettre un terme aux actes de violence qui leur sont faits.
Voici les démarches à faire quand on est une femme battue.
1. Signalez les faits si vous êtes une femme battue
Les victimes de violences conjugales ont tendance à culpabiliser et à se taire. Pourtant, pour faire cesser les faits, la première chose est d'en parler et de les signaler.
Parlez à un proche
Pour ne pas être seule, et pour commencer à envisager une solution d'hébergement alternative, il est important d'en parler à quelqu'un de proche.
Signalez les faits par téléphone
Il est possible d’obtenir de l’aide en téléphonant au 3919 « Violences femmes info ».
- L'appel est anonyme et gratuit depuis un fixe.
- Le 3919 est accessible du lundi au vendredi, de 8 h à 22 h (18 h les samedi, dimanche et jours fériés) pour le prix d'une communication locale.
Ce numéro aiguille les victimes vers un réseau de 65 associations dédiées aux femmes victimes de violences.
Important : il s'agit d'un numéro d'écoute ; en cas de danger, composez le 17 (police ou gendarmerie) ou le 18 (pompiers).
Signalez les faits à un médecin
Le médecin peut être informé. Comme il est tenu au secret médical, il ne parlera pas des violences faites à la victime sans l'accord de celle-ci. Il lui remettra un certificat médical constatant les blessures, et qui servira dans une procédure judiciaire ultérieure.
Depuis le 2 avril 2021, toute victime de violences conjugales peut obtenir une copie du certificat médical constatant les violences, à sa demande (décret n° 2021-364 du 31 mars 2021). Cette remise peut être réalisée par tout moyen, y compris par voie dématérialisée, par l’envoi d’une version numérisée du certificat à l’adresse électronique de la victime.
Bon à savoir : la remise de la copie du certificat médical ne peut pas être effectuée par courrier lorsque la victime réside à la même adresse que la personne à l’encontre de laquelle elle a déposé plainte.
Les victimes sont informées du droit à la copie du certificat médical par l’officier ou l’agent de police judiciaire lorsqu'elles déposent plainte ou lors de leur audition par les services enquêteurs.
Signalez les faits aux forces de l'ordre
Il est important que la police et la gendarmerie soient tenues au courant afin d'intervenir et de protéger les victimes, si nécessaire.
Les femmes victimes ont pourtant souvent du mal à porter plainte. Une première démarche consiste à signaler les faits au commissariat, dans une main courante.
2. Demandez une protection à la justice si vous êtes battue
Judiciairement, il existe des mesures pour protéger les femmes victimes de violences conjugales. La loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019 a prévu diverses mesures visant à agir contre les violences au sein de la famille : délai de délivrance par le juge aux affaires familiales d’une ordonnance de protection fixé à 6 jours maximum, recours au bracelet anti-rapprochement facilité, dispositif du téléphone grave danger élargi, mesures d'aide au relogement de la victime, suspension de l'autorité parentale dans certains cas, etc.
Bon à savoir : il n'est pas obligatoire de se faire assister d’un avocat, même si cela est conseillé.
Saisissez le juge civil
Avant même d’engager une procédure de divorce ou de porter plainte, vous pouvez saisir le juge aux affaires familiales (JAF). Celui-ci peut délivrer en urgence une ordonnance de protection (article 515-11 du Code civil) et prendre les mesures suivantes :
- interdire à votre partenaire violent d’entrer en relation avec vous, vos enfants ou vos proches ;
- lui interdire de détenir une arme ;
- vous autoriser à dissimuler votre nouvelle adresse ou vous attribuer le logement conjugal ;
- statuer sur la résidence séparée des époux (la jouissance du logement conjugal est attribuée, sauf ordonnance spécialement motivée justifiée par des circonstances particulières, au conjoint qui n'est pas l'auteur des violences, et ce même s'il a bénéficié d'un hébergement d'urgence) ;
- obliger votre partenaire à contribuer aux charges de la famille.
Cette ordonnance est donnée pour une durée maximale de 6 mois à compter de la notification de l'ordonnance. Elle peut être prolongée au-delà si, durant ce délai, une requête en divorce ou en séparation de corps a été déposée ou si le juge aux affaires familiales a été saisi d'une requête relative à l'exercice de l'autorité parentale.
Bon à savoir : le non-respect de ces mesures est un délit ; votre conjoint peut être arrêté et mis en détention provisoire.
Saisissez le juge pénal
Pour obtenir des mesures de protection par le juge pénal, il est nécessaire de porter plainte contre l’auteur de vos violences physiques.
Le juge pénal peut prendre des mesures immédiates avant le procès pour assurer votre sécurité et, le cas échéant, celle de vos enfants, notamment :
- dissimuler votre adresse – vous serez domiciliée au service de police ou de gendarmerie enquêteur ;
- prononcer l’éviction de votre conjoint violent du domicile ;
- lui interdire de vous rencontrer ou de vous approcher ;
- lui interdire de fréquenter certains lieux ;
- prononcer l’obligation d’un suivi thérapeutique pour lui ;
- le placer en détention provisoire.
3. Portez plainte si vous êtes une femme battue
Porter plaine est une démarche difficile pour les victimes. Pourtant, c'est le meilleur moyen de faire cesser les violences.
La plainte déclenche une enquête judiciaire entraînant des sanctions pénales pour l'auteur des violences, qui peut être condamné à une amende de 15 000 € à 150 000 € et/ou à une peine d’emprisonnement.
Réunissez des preuves
Bien souvent l’agresseur nie, renverse les rôles et accuse la victime de mensonge ou d’être elle-même responsable des faits. Il est donc important de réunir un minimum de preuves de la situation :
- en allant voir un médecin qui établira un certificat médical constatant les coups et blessures ou votre détresse psychologique ;
- en réunissant des témoignages de proches (enseignants, amies, famille, assistante sociale…) ;
- en sauvegardant les messages, textos et e-mails que votre conjoint vous a envoyés.
Rendez vous au commissariat ou à la gendarmerie
Pour porter plainte, vous devez vous rendre au commissariat ou à la gendarmerie.
Aucun document particulier n'est nécessaire. Mais plus vous aurez de preuves, plus votre plainte a de chances d'aboutir.
4. Quittez le domicile conjugal
Que vous soyez mariée ou non, si vous subissez des violences vous avez le droit de quitter, du moins provisoirement, le domicile conjugal et d’emmener vos enfants avec vous, sans qu’on puisse vous le reprocher.
Si l'auteur des violences est le père de vos enfants :
- vous devez signaler votre départ au commissariat ou à la gendarmerie (main courante),
- puis déposer une requête auprès du juge aux affaires familiales (JAF) afin d'obtenir, à titre provisoire, l'autorisation de résidence séparée et fixer le sort des enfants mineurs.
Si votre départ ne se fait pas dans l'urgence
Il est conseillé :
- de quitter votre domicile le matin plutôt que le soir, et en début plutôt qu'en fin de semaine – vous éviterez ainsi de vous retrouver seule lorsque les services sociaux sont fermés ;
- de déposer chez une personne proche ou de confiance, ou bien en lieu sûr, les documents dont vous aurez besoin en cas de départ précipité :
- les papiers officiels, carte de sécurité sociale, chéquiers, etc. ;
- les preuves (certificats médicaux, témoignages, photos, etc.)
- un sac avec de l’argent, des vêtements, etc. ;
- de vous signaler aux services sociaux, notamment pour les démarches de logement et la constitution des dossiers d'aides sociales – commencez par les assistantes sociales de secteur, contactez également le CCAS de votre commune.
Assurez-vous que vous pouvez être hébergée par un proche. Sinon :
- rapprochez-vous des associations chargées de trouver aux femmes battues un hébergement temporaire dans un centre spécialisé pour femmes ; leurs coordonnées peuvent être obtenues auprès des centres d'Informations aux droits des femmes (CIDFF) :
- www.infofemmes.com
- ou en téléphonant au 01 42 17 12 00 ou au 3919 ;
Remarque : ces centres d'hébergement sont, malheureusement, souvent saturés.
- à long terme, vous pourrez vous faire attribuer un logement familial par le juge civil.
Bon à savoir : depuis une instruction du 8 mars 2017, la mobilisation des acteurs du logement social est renforcée afin de faciliter l'accès au logement social des femmes victimes de violences.
Si votre départ se fait dans l'urgence
Une femme battue ou menacée peut appeler le Samu social (115), lequel dispose de quelques places en centres.
Une fois l’hébergement trouvé :
- signalez la cause de votre départ au commissariat ou à la gendarmerie, dans une main courante ;
- puis déposez en urgence une requête au juge aux affaires familiales pour organiser la séparation, notamment, pour vous faire attribuer le logement et pour les enfants.
Bon à savoir : le recours à un avocat n’est pas obligatoire, sauf pour la procédure de divorce.
À noter : depuis le 1er décembre 2023, une aide universelle d'urgence peut être accordée, sous conditions de ressources, aux personnes victimes de violences conjugales. Ce dispositif a été mis en place pour leur permettre de quitter rapidement le foyer, de faire face aux premières dépenses, etc. (décret n° 2023-1088 du 24 novembre 2023).